
Sexisme, violences sexuelles et psychologiques
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, l'ampleur des témoignages de violences subies par les femmes dans la musique, rendus possibles par une libération de la parole, montre que non seulement ce fléau ne régresse pas avec le temps, mais qu'il s'amplifie avec le niveau d'instruction des femmes. C'est ce que dénonce l'auteur et paléoanthropologue, Pascal Picq dans son livre Et l'évolution créa la femme. (Odile Jacob)
40% des femmes artistes vivent ou ont vécu des situations de harcèlement sexuel (enquête Cura Collectif 2019). D'une manière presque systématique, les femmes dans le milieu musical font l'objet d'une stigmatisation sexuelle. Leur physique, est pour une grande majorité d'hommes, un critère d'évaluation qui surpasse la qualité artistique.
Face à ce fléau, de nombreux collectifs féminins voient le jour, et les institutions commencent à se mobiliser sérieusement.
expression libre
Non ! Annie n'aime pas les sucettes...
Dans les années 1960, Serge Gainsbourg, reconnaissant à France Gall son grand sens musical, lui écrit plusieurs chansons. Poupée de Cire, Poupée de Son, permet à la jeune interprète de remporter le Grand Prix de l'Eurovision en 1965, mais le titre réduit déjà les chanteuses à de dociles objets.
L'année suivante, il lui inflige la pire humiliation de l'histoire de la musique en lui faisant chanter "Annie aime les sucettes, les sucettes à l'anis..."
A travers ce titre faussement naïf, l'homme à tête de chou profite de l'ingénuité de l'adolescente pour lui faire célébrer la fellation à son insu.
Se délectant de son forfait, il en rajoute en demandant à la chanteuse en direct à la télévision : "Explique-moi Les Sucettes !"....
La définition de la perversion n'est-elle pas : "Jouir aux dépens des autres ?"
Sans faire dans le puritanisme, ni dénigrer le talent de l'artiste, l'offense qu'il lui impose dans une orchestration grandiloquente est au delà de la provocation. Stupeur ! Lorsqu'elle comprend qu'elle a été manipulée à la fois par Gainsbourg et par son impressario, France Gall se terre dans sa maison, elle ne veut plus sortir, ni faire de radio, ou de télévision. La honte c'est classique, n'est pas du bon côté. Malgré l'immense popularité de la chanson, elle refusera de la chanter à tout jamais prétextant élégamment que ce n'était plus de son âge. Heureusement sa vie avec Michel Berger lui apportera l'accomplissement artistique et le bonheur personnel, mais cinquante ans plus tard, Les Sucettes avait encore pour elle un goût amer. En 2015, elle confiait dans une interview pour le Parisien, que cette chanson lui avait "changé" son rapport aux garçons.
Personne n'a jamais semblé s'émouvoir de cette écœurante perversité ni lorsque la chanson est sortie, ni plus tard... et je ne suis sans doute pas la seule prénommée ainsi, à qui l'on a demandé des dizaines de fois avec un air entendu "si j'aimais les sucettes ?"
Merci, sans façon ! L'anis c'est spécial... un peu poivré, on en fait une boisson d'une autre époque. Les parfums qui ont plutôt la faveur des enfants ont le goût de la franchise, la douceur de l'amour bienveillant et désintéressé.
AC
Enquêtes et manifestes objectivent l'importance des violences sexuelles et psychologiques dans le milieu de la musique
En Mars 2019, une enquête du Syndicat des Artistes Musiciens pointe une forte proportion de pratiques sexistes qui éloigne les femmes de tous les métiers de l’industrie musicale. Le 20 avril 2019, Télérama publie un manifeste de 690 femmes engagées dans les métiers de la musique (F.E.M.M.) qui dénoncent un sexisme au quotidien, élevé au rang «d’art de vivre» par certains hommes en position de pouvoir. «Le sexisme est une arme soit pour abuser des femmes, soit pour les rabaisser et saper leur confiance en elles... et cela se fait sous couvert d’humour» témoignent les musiciennes, ainsi que les attachées de presse, et les salariées de l’industrie musicale.** Au final, elles seront plus de 1000 à appeler au changement des mentalités et des pratiques.
Faux :
les propos à connotations sexuelles répétés relèvent de comportements intimidants, dégradants ou offensants et sont reconnus comme du harcèlement environnemental.
Faire des blagues salaces,
ça détend l'atmosphère !
Des arrangements féminins ambivalents.
Musiques actuelles en Suisse romande
Marc Perrenoud et Jérôme Chapuis, Université de Lausanne
Un document très intéressant qui montre que les rares femmes qui parviennent à exister dans le milieu professionnel sont réduites à un ensemble très limité d’arrangements stratégiques avec la domination masculine, entre dépendance (jouer en couple), figure maternante (être « leader ») et isolement (jouer en solo). Lorsqu’elles s’affirment comme femmes instrumentistes dans un milieu largement masculin, voire qu’elles cherchent à subvertir le genre en jouant avec les codes et les apparences, les musiciennes se trouvent marginalisées dans l’espace professionnel, sauf dans les rares cas d’un usage stratégique de la féminité sexualisée qui produit une « émancipation » pour le moins ambivalente.
changededisque.fr
Une nouvelle plateforme qui lutte contre les problèmes structurels (rémunération, progression de carrière) et les violences systémiques (sexistes et sexuelles) dans la musique.
Les actions de cette association s'organisent autour de 4 objectifs : interconnecter les initiatives existantes, faire de la pédagogie, créer des outils accessibles à tou.te.s, proposer et militer pour des mesures concrètes pensées collectivement.
Elle ance un appel à volontaires pour constituer des groupes de travail.

Ici c'est cool
Dispositif national créé dans le but de prévenir et de réagir aux violences et abus dans les lieux festifs :
Cocktail anti-relou, formations et fiches pratiques sont accessibles sur le site ressource afin de déjouer les violences sexistes et sexuelles, les agressions racistes ou homophobes
Web-Documentaire : Soror Sonore
Etre une femme dans la musique
Quelle est la place des femmes au sein de l'industrie musicale ?
La solution ne serait-elle pas la sororité ?
Réalisé par Kahina At Amrouche-Hachi et Célestre Ramis
SEXISME
XXL
Dans une interview à Paris Match pour sa promo, Jean Louis Murat tient des propos profondément misogynes à l'égard des femmes dans la musique
Paris-Match édition du 19/04/2020 extrait :
"Angèle, c’est une Chantal Goya 2.0. Et je sais de quoi je parle. Lucie, ma petite-fille de 8 ans, en est dingue. Nous, les mecs, elle nous surplombe avec un culot dingue, elle nous dit “Tu ne regardes pas, tu ne touches pas” tout en faisant des chorégraphies de peep-show. Mais t’as envie de lui dire : “Arrête, ma fille, arrête.” J’en ai côtoyé pas mal, des chanteuses qui ont la science infuse. Mais Beyoncé ou Rihanna n’ont jamais écrit un titre. Si elles n’avaient pas des mecs derrière, elles n’en seraient pas là. Angèle, elle va prendre des airs de pré-mamie bientôt et ce sera fini."
Certes, Jean-Louis Murat est connu pour ses attaques destinées d'autres artistes masculins, mais dans ces propos contre Angèle, la jalousie le pousse à sexualiser son attaque, bien mal à propos d'ailleurs. Angèle n'est justement pas de celles à jouer la carte de la sexualisation pour s'imposer.
Quant à la supposée improductivité féminine, le chanteur de 68 ans ne se souvient sans doute plus qu'il doit à une femme l'écriture de l'un de son plus grand succès : Regrets en duo avec Mylène Farmer.